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Le Tournoi donne pleinement au noble jeu ce qu'on appelle, dans le jargon sociologique, sa " dimension festive ".Pour que la fête soit totale , il lui faut rassembler six ou sept éléments, que l'on retrouve là.
D'abord, un cadre, un lieu rituel. Comme les fêtes médiévales, le tournoi se déroule sur plusieurs plans ou plateaux mais si bien définis, si bien sacralisés qu'ils finissent par faire un tout: Twickenham, Murrayfield, l' Arm's Park, Lansdowne Road, Colombes.
Deuxièmement composante de la fête: la périodicité. Plus elle est longue et plus la fête est solennelle. On le voit bien avec les JO. On nous a maintenant changé l'ordonnancement de nos rites. Un France-Galles en janvier! Et pourquoi pas les vendanges en mars ?
Pour qu'il y ait fête, encore, il faut que s'y rassemble une masse et que cette masse y affirme sa participation. Pour ce qui est de la participation , on attend que l' International Board supprime une fois pour toute les pénalités pour oublier que les 31 ne sont pas seul sur l' herbe.
Pour que la fête soit fête, il faut bien sûr un certain rituel de gestes, de couleurs, de figures et de sons, liés au sentiment du merveilleux, du sacré, du magique. C'est dans le tournoi, où les règles sont mieux honorées, la couleur des maillots plus simples, les chants plus traditionnels que ces exigences sont le mieux respectées.Mais est ce au tournoi qu'il faut rattacher cette histoire que je préfère à toute celles qu'a suscitées le truculent jeu de Rugby. Un bantou revient dans sa tribu, après un long séjour en Angleterre." Alors, ces européens? " " iIs sont plus fort que nous "-" Par quoi? "- " Par la magie. Le samedi, ils se rassemblent autour d' un pré. Tout d' un coup entre trente guerriers costumés de couleurs vives. Pui un en noir. Ce dernier sort un sifflet de sa poche, souffle dedans: et alors la pluie se met à tomber "
Extrait de Miroir du Rugby-no 159- janv.fevr.1975- Jean Lacouture
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