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Défense de fer à l'Arm's Park de Cardiff
L'affaire avait commencé selon un rituel bien rôdé.Par deux fois le même Haget se fit prendre au piège du règlement.Et l'on frôla le Francis à zéro tant la deuxième pénalité Thorburn passa près.Toujours est-il que ça jou-
ait côté gallois,gaillardement,comme prévu,et côté français,généreuse-
ment.Comme espéré.Les Gallois avaient le vent.Les français avaient le
culot.On le sentit dès la première attaque à la main allumée par Sella
avec au bout un premier solo de Lafond.Peu après,sans un frisson,Lapo-
rte passa un drop comme il les aime,avec juste ce qu'il faut de hausse et de longueur.Et puis,les Français,souvent repérés en territoire rouge,don-
nèrent une bonne balle d'attaque derrière.La balle,servit par Charvet pour Sella au ras,tomba mais,cavalier et cheval,l'Agenais la reprit et servit Laf-
ond qui avait trente bon mètres à parcourir
et trois adversaires à semer.
Les Français n'avaient pas besoin ,en plus de leur désir de jouer et de jouir,d'une quelconque indulgence en défense.Ils furent trois,Hadley,Da-
vies et Jones,à s'agripper à un corps nerveux et probablement savonné.Et c'est ainsi que de déhanchements en changements,de pieds et de mains,
griffu,plein de raffuts,le Parisien arriva jusqu'à la ligne avec son trophée dans les mains.Et l'aplatit.
C'est alors que commença une tranquille démonstration de jeu d'avants,
en particulier dans les regroupements et jusque dans certaines mêlées
tournées.Et à chaque ballon donnée derrière,le jeu s'embrasa sous l'im-
pulsion d'une dizaine de jambes qui n'en finissaient de flamber.Sella re-
mit ça pour reprendre une balle au sol après une accélération de Charvet qui lui fit crever l'écran gallois sans parler des milliers d'autres en France.
Sella planta l'essai comme un gros poireau dans le dernier jardin gallois
avant la sortie.Et trois minutes plus tard Blanco alluma une grande bleue
dans le ciel de Cardiff pour se retrouver à la chute et
provoquer le deu-
xième essai de Lafond.On songeait,encore et toujours, à l'expression de Fouroux pour expliquer que ce XV de france s'expose aux effets boom-
rang d'un jeu soi-disant trop ambitieux :"C'est un équipe à hauts risques"

la Berbize affute la passe |
On préférait traduire pour lui que les "risques" en question étaient ceux que l'équipe de France s'infligeaient à elle même dans l'art de provoquer les arbitres anglo-saxons et,en la circonstance,de s'exposer au gros coup de serpe de Thorburn.Car le jeu à grands rayons des quatre-quarts ét-
aient autant de risques pour l'adversaire.Cette notion personnelle du ris-
que se justifiait jusqu'au malaise non pas pour cette équipe de France mais pour le jeu qu'elle montrait: à moins d'une heure,sur une faute de Joinel cette fois,le Pays de Galles n'était plus qu'à deux points (15-17) de la France,laquelle menait pourtant trois essais à zéro.Un quart d'heure plus tardil y en eut,par bonheur pour eux et le jeu,un quatrième en pro-
longement d'un coup de pied tarabiscoté de Berbizier.Bonneval,en geste souple,fit un magnifique cadeau à Blanco accouru dans son dos. 23-15;
s'ils en restèrent là ce n'est pas faute d'avoir repoussé du monde.Car,en plus,ceux de partout,de l'arrière surtout,défendirent comme des affamés les derniers morceaux de gazon convoités par les Gallois pour réduire une vexation.Il y eut là une remarquable démonstration d'amour-propre cette fois.Ils avaient une telle fringale,en effet,que ce fut un festin pour eux au moment de recevoir les derniers élans des Gallois en pleine fête nationale.Ce fut cruel par moment.Ils leur laissèrent le croupion et s'en repartirent avec les ailes et les cuisses.
Une équipe de France venait de marquer pour la deuxième fois quatre essais aux Gallois à l'Arm's Park de Cardiff
.... la première en 1960.
Une équipe de France qui avait non seulement gagné pour elle mais aussi pour les autres,une authentique victoire à mains ouvertes.
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